Le français porte mal
son nom, qui vient du peuple germain qu´étaient les Francs
Or notre langue n'est pas germanique, elle est romane, c'est-à-dire
d'origine latine, et ce n'est que plus tard qu'elle subit l'influence des
Francs. De plus, on a souvent tendance à faire remonter notre langue
au gaulois, langue celtique, ce qui est une erreur.
1. L'Europe
linguistique à l'aube de l'Histoire
a) Avant les Indo-européensLes Gaulois n'étaient évidemment pas les premiers habitants de la Gaule, mais on sait peu de choses sur les populations qui les avaient précédés, si ce n'est quelques noms de peuples comme les Aquitains, les Ibères ou les Ligures (voir carte ci-dessous). Les quelques traces de ces langues non-indo-européennes se retrouvent surtout dans des noms de fleuve (comme la Loire, anciennement Liger, ou Seine, … ) et de lieux (Manosque, Tarascon, Luchon, …), ainsi que quelques rares mots que l'on peut qualifier de "pré-celtiques ", (comme avalanche, motte, jabot, …). Cependant, si le ligure et l'ibère restent des langues mystérieuses, on en connaît plus sur l'aquitain grâce à ses lointains descendants, les Basques, qui ont su résister au fil des siècles.
b) Les GauloisLe gaulois est une langue celtique, qui appartient à la grande famille des langues indo-européennes.
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2.Les temps romains
Quoi qu'il en soit, vers 120 avant JC, avait commencé la conquête romaine de la Gaule. En un peu plus d'un demi-siècle, l'ensemble de la Gaule était dans l'orbite romaine et les Gallo-romains abandonneront finalement leur langue celtique en faveur du latin. Ils se mirent à parler latin à leur façon, avec leur accent, leur prononciation. Ainsi, dans leur bouche, "auguste" par exemple, devint agosto, puis aosto, aoust et enfin août.
3. Les invasions barbares
Ainsi, ce latin ne
ressemblait déjà plus guère à celui de Rome
quand débarquent au IIIieme siècle des envahisseurs germains
(Burgondes, Wisigoths, et bien sûr les francs ). L'installation des
Francs en Gaule va laisser quelques 400 termes dans le vocabulaire gallo-romain,
en particulier des termes de la guerre (arquebuse, trêve, flèche,…)
et du vocabulaire rural (guêpe, bûche, roseau,…) . Mais
ces envahisseurs vont peu à peu adopter la langue gallo-romaine,
en particulier grâce à la conversion au catholicisme de leur
chef Clovis, ce qui va contribuer à maintenir la pratique du latin
( comme véhicule de la vie religieuse ) . Trois siècles plus
tard, Charlemagne encourage lui aussi l'enseignement du latin. Ainsi, cette
duplicité Latin/germain va se généraliser et peser
sur la langue française en gestation.
NB: Les invasions
vikings du IXe et Xe siècle n'ont donné que des parlers locaux
et un peu de vocabulaire marin (cingler, hauban, vague,…) .
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4. Les débuts du français
Il est difficile de déterminer
avec exactitude la "date de naissance" du français car les premiers
textes en français sont rares. Le plus célèbre est
celui des "Serments de Strasbourg", signé en 842 par les petits-fils
de Charlemagne, (voir extrait ci-dessous ), qui est considéré
comme le premier document officiel de la langue française; une langue
encore bien loin de celle que l'on parle actuellement !
On peut également citer la "Séquence
de sainte Eulalie", suite de 29 vers qui raconte la vie exemplaire d'une
jeune fille martyrisée au IVe siècle. Dans ce texte en ancien
français écrit au IXe siècle, on reconnaît déjà
mieux notre langue contemporaine.
5. Le Moyen-Age : le temps des dialectes
Cependant, malgré
ces premiers textes, il serait abusif de parler de LA langue française
à cette époque. Le latin ressassé par des bouches
différentes avait fini par prendre des formes aussi différentes
dans chaque région. Ce morcellement en dialectes divers fut d'autant
plus facilité par le système féodal et le cantonnement
autour de la terre du seigneur. On distingue ainsi à cette époque
trois principaux dialectes :
-la langue d'oc (dans laquelle oui se dit "oc" ) avec
un parler plus proche du latin.
-la langue d'oïl (où oui se dit "oïl"
) influencé par les langues germaniques.
-le franco-provençal (parler de type occitan qui
se rapproche de la langue d'oc)
-et de nombreux parlers plus régionaux : basque,
catalan, breton, flamand, alsacien, …
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6. L'affirmation
du français
Dès la fin du XIIe,
la "langue du roi", c'est-à-dire le parler de la cour et d'Ile de
France, est mieux reconnue, et elle devient une langue de prestige élargissant
ainsi son domaine.
C'est à partir
de la Renaissance, quatre siècles plus tard, que la question de
la fixation de la "langue du roi" se pose fortement. Dans le domaine de
la vie pratique, le français remplacera désormais le latin
dans tous les documents administratifs, à partir de 1539, date à
laquelle François 1er prend la célèbre "Ordonnance
de Villiers-Cotterêt". Il faudra dorénavant que tous les
textes officiels soient rédigés en "langage maternel françois"
. Dans le même temps, les auteurs littéraires se mettent aussi
au français.
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7. Le temps du bon usage: le français classique
Après le foisonnement
de la Renaissance, le XVIIe va vouloir endiguer ce flot d'innovations en
fixant l'orthographe et la prononciation. La langue, instrument de centralisation
politique devient donc une affaire d'Etat: En 1635, Richelieu fonde l'Académie
française , qui est chargée de créer un dictionnaire,
une grammaire et de prendre soin de la langue française.
8. Le français moderne-la fin des patois
Un siècle plus tard, à
l'époque de la Révolution, la Convention, éprise de
centralisme portera le premier coup à la vitalité des patois,
jugés néfastes pour la République "une et indivisible";
notamment par le rapport de l'Abbé Grégoire sur la nécessité
absolue d'abolir les patois.
Dans la France du XIXe, la langue
française gagne du terrain, mais on parle encore patois à
80% dans la plus part des circonstances de la vie quotidienne. A partir
de 1880, Jules Ferry instaurera l'école laïque, gratuite et
obligatoire, dans laquelle l'enseignement se fait naturellement en français.
C'est ainsi que l'usage des patois commença à se raréfier.
9. Le français contemporain
Au XXe siècle, c'est encore
le français, c'est-à-dire la langue commune, qui bénéficiera
des nouvelles techniques, permettant une plus large diffusion, (la T.S.F.,
la radio, la télévision,…). Ceci a nettement contribué
à l'uniformisation de la langue, tant au niveau du vocabulaire,
qu'au niveau de la prononciation qui tend à devenir plus neutre,
et délaissant peu à peu les parlers régionaux. Peut-on
ainsi aller jusqu'à dire que le français perd lentement sa
richesse?
En conclusion, on peut
dire que le français est la plus germanique des langues romanes.
Son histoire est celle de l'évolution du latin parlé en Gaule
et de son enrichissement constant, apporté avec le temps au contact
des langues voisines.
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Voici un schéma récapitulatif des grandes
étapes dans l'évolution du français: